L’auberge de jeunesse dans laquelle nous avons pris deux lits dans un dortoir, propose des visites à la journée sur la Grande Muraille (à Mutianyu). Réveil 5h du matin, départ du bus 5h30, 2 heures de trajet, quelques heures sur une partie refaite de la muraille, avec tout le groupe. Repas de midi sur place puis retour à Pékin vers 15h. S’il n’y avait pas eu le réveil à 5h, on aurait été super motivés par la facilité du tour organisé : suivre un guide dès la sortie de l’auberge, jusqu’à la muraille, faire les moutons là-bas puis revenir à 15h pour finir notre nuit, semble être un bon moyen pour construire un souvenir inoubliable de cette folle construction.
« Chargés de 7 litres d’eau chacun (7 kg, dans ces conditions c’est plus significatif), en plus de nos sacs habituels, nous jouons aux équilibristes sur cette première partie très endommagée du parcours »
Quelques recherches sur internet nous permettent de trouver une partie non rénovée, ni exploitée, de la muraille, et assez proche de Pékin. Pour corser encore un peu les choses, nous décidons d’y aller en stop.
Nous partons en milieu de matinée, à 9h. D’abord remplir nos sacs à dos de nouilles chinoises et de gâteaux secs pour environ quatre jours. Puis faire le plein de la petite bouteille d’essence auquel carbure notre réchaud multi fuel. La première tâche, vous vous en doutez, s’avère on ne peut plus facile dans l’Empire du milieu. La deuxième par contre, nous confronte à une nouvelle chinoiserie. Alors qu’en Mongolie nous avions pu faire remplir la bouteille (prévue à cet effet) chez un pompiste, à Bat-Ulzi, sans lever la moindre interrogation, ici les stations services appliquent la stricte interdiction de remplir autre chose que des réservoirs de motos ou voitures. « Ou il vous faut une autorisation spéciale de la police », aux dires du pompiste chinois. Qu’à cela ne tienne, un couple de chinois parlant anglais nous vient en aide et nous amène, à bord de leur grosse berline, au commissariat le plus proche. Ils nous accompagnent à l’intérieur, pour la traduction, mais en vain, se retrouvent face à des fonctionnaires qui n’en ont que faire de nos soucis. Et en bon citoyens chinois, pas question d’insister. Notre plan de faire sauter une partie en ruine et sans touristes de la muraille de Chine, avec 0,6L d’essence, tombe doucement à l’eau.
Le mari nous propose de siphonner un peu d’essence de sa voiture, si nous avons un tuyau souple en plastique. Nous penserons à en mettre un dans notre « kit pour survivre en Chine » pour la prochaine fois. Dernière solution, le mari, toujours lui, connaît un magasin de matériel Outdoor à deux pâtés d’immeubles d’ici. Le couple nous y dépose et nous trouvons effectivement des bombonnes de gaz, aussi adaptées à notre réchaud.
La suite est un trajet. D’abord en métro jusqu’à la sortie de la ville, puis en stop jusqu’à Xishuiyu, au pied de la muraille. Du stop qui s’est avéré payant, puisque le chauffeur qui nous a pris a décidé de nous amener plus loin que la route qu’il avait initialement prévue de faire, et de nous réclamer des Yuans une fois arrivés à destination. Malentendu ou arnaque, ce genre de « galères » font parties d’un voyage hors des sentiers battus.
Xishuiyu est un lieu où on peut aussi faire le choix de payer pour visiter une petite partie rénovée de la muraille, en partant vers la gauche face aux guichets. Nous nous dirigerons vers la droite, sans passer par les guichets et en nous glissant discrètement derrière le grand panneau bleu sur lequel il est indiqué : « This section of the Great Wall is not open to the public ». Autant dire à un enfant de ne pas ouvrir un tiroir parce que des bonbons y sont cachés. Ce panneau nous confirme qu’on est sur la bonne voie.
Comme il est déjà 15h, qu’il fait particulièrement chaud et surtout qu’une guest house nous tend les bras, nous faisons le choix de n’attaquer l’ascension que le lendemain matin, à des heures plus fraîches. Après une longue sieste et une fois la chaleur retombée, on se contente d’un petit repérage sans nos sacs à dos, et admirons le coucher de soleil avant de redescendre à la lueur de nos frontales.
Non, la grande Muraille n’est pas visible de la lune. Une idée reçu qui a la vie dure. Qui n’a pas répété cette légende urbaine ? Nous les premiers, et il a fallu qu’on face tourner le globe de moitié sous nos pieds jusqu’à l’Empire du milieu, pour apprendre la vérité. Ça paraît encore plus évident quand on y met les pieds. Bien qu’imposante, la muraille n’est pas très large. Si elle devait être visible de la lune, alors beaucoup de routes et autoroutes le seraient aussi. Ça donnerait une bien curieuse perspective de la Terre vue d’en haut. Une boule entourée de nombreux rubans noirs…
« C’est toute la beauté de l’endroit. La végétation a envahi la construction humaine »
La construction de la Grande Muraille de Chine, 6300 km + 360 km de tranchées et 2200 km de barrières naturelles, environ 6 à 7 mètres de hauteur, 4 à 5 mètres de largeur, a cette particularité de suivre les crêtes les plus abruptes et les sommets les plus hauts des montagnes qu’elle traverse. Peu de sentiers de randonnées peuvent se vanter d’une telle difficulté, passant en toute logique par les cols et serpentant par les flancs pour éviter des dénivelés inutiles. Impossible aussi de trouver de l’eau une fois là-haut. Pour ces raisons, nous nous contentons d’une randonnée assez courte. De Xishuiyu à Huanghuacheng. Une après-midi pourrait suffire pour relier les deux villages sans être chargés de gros sacs à dos. Nous prendrons notre temps, profiterons du lieu, et y passerons deux nuits sous notre toile de tente.
A 7h du matin nous attaquons la première montée. Celle que nous avions repérée la veille. Chargés de 7 litres d’eau chacun (7 kg, dans ces conditions c’est plus significatif), en plus de nos sacs habituels, nous jouons aux équilibristes sur cette première partie très endommagée du parcours. C’est toute la beauté de l’endroit. La végétation a envahi la construction humaine. L’abîmant parfois en incrustant ses racines dans les moindres failles, et faisant éclater la pierre en grossissant avec le temps. C’est un peu les temples d’Angkor mais sans les touristes : un lieu qui a gardé toute son énergie.
« Les temples d’Angkor mais sans les touristes : un lieu qui a gardé toute son énergie »
Le dernier quart de la première montée a mieux résisté au temps. Des arbustes poussent de-ci de-là mais les gardes fous, des remparts crénelés, sont restés intacts. Une sécurité rassurante quand les touristes en contre-bas, sur la partie payante, ne sont plus que des points vus d’ici. La montée par contre est encore plus abrupte. Sans l’escalier et ses grandes marches irrégulières, nous n’aurions certainement pas pu gravir cette pente. Arrivés en haut, le point de vue est majestueux. Entourée de montagnes recouvertes d’une végétation qui ne laisse apparaître que de rares pitons rocheux, la muraille file au loin et parfois se divise. Tout en bas, la partie touristique et le lac artificiel n’entravent pas le paysage. Les cris des groupes qui ont choisi un tour organisé avec animation remontent jusqu’à nos oreilles. Eux ne se doutes certainement pas que de tout là-haut, d’entre les ruines, deux paires d’yeux les observent.
Seul cet épais brouillard gris, amplifié par les grosses chaleurs estivales, cette pollution pour beaucoup créée par les centrales aux charbons (+ de 65% de la production d’électricité de la Chine) qui nous empêche de voir le soleil, nous fait dire que ça pourrait être encore plus impressionnant.
On s’offre le temps de faire une première sieste ici, à l’ombre d’une tour de guet, jusqu’à midi. Et puis notre première soupe de nouilles chinoises de la randonnée.
Par petites étapes nous continuons vers l’est. D’abord ça redescend, forcément, puis ça remonte, une pente régulière jusqu’à la prochaine tourelle. Loin d’être les premiers à passer ici, un sentier s’est formé sous le poids des pas des randonneurs. Puis ça redescend, beaucoup plus raide cette fois. On tend la jambe, palpe le sol voir si la semelle y trouve une accroche, et si oui, on bascule notre centre de gravité pour faire de même avec l’autre jambe. Une petite maladresse, une jambe fébrile, risquerait de nous entrainer dans une longue et douloureuse glissade.
En fin d’après-midi nous arrivons au creux d’une vallée. La suite de la muraille est en bien meilleur état, rénovée mais pas officiellement exploitée. Nous y croisons quelques touristes chinois et aussi étrangers. Du creux de cette vallée c’est une interminable pente qui monte jusqu’à notre dernier point haut. Nous y posons la tente pour une première nuit et à quelques dizaines de mètres de là pour la deuxième.
Le dernier matin nous descendons jusqu’à Huanghuacheng, où nous passons une nuit dans une guest house avant de rentrer sur Pékin. En bus cette fois.
10 Comments
Ohohhhh je vois que ça avance ! Bonne idée de nous avoir envoyé un mail Coline, et bonne route à vous !
Vous êtes magnifique.
Belle réussite.
Bravo et bonne route.
Bisous des Nantais
Des escaliers à la mesure de vos rêves…
Hé hé ! vous avez faits ce qu’on a pas eu le temps de faire il y a un an … déjà ! On situe très bien le début de cette rando et on vous envie…. on pense aussi à vous sous la chaleur des étés chinois… dans la cacophonie et la pollution… on vous envois du ciel bleu ! Belle suite d’aventure à tous les deux… on vous garde une place au retour pour des échanges in-vivo… si vous revenez … si nous ne sommes pas repartis… bon vent !
Bonjour Coline, bonjour Marcel,
que de chance et de courage vous avez !
Superbes paysages qui ne pourront que vous laisser d’impérissables souvenirs.
Tous nos vœux de réussite et de plaisirs pour la suite de votre perriple
On attend la suite
Bises à vous deux
Hy Marcel
Bin begeistert.
Ich werde euch in Deutsch folgen und Google bemühen.
Michael / Pia / Schweiz
Ist sehr lange her das wir uns gesehen haben.
Hey Micha ! Was für eine Überraschung. Ja ist schon sehr lange her, ich weiss gar nicht mehr wann genau. In sud Frankreich vielleicht.
Wir würden gerne irgendwann auf deutsch, mindestens auf englisch zusätzlich schreiben. Aber noch wäre das zuviel Arbeit.
Zum Glück ist google da 🙂
très grand cinéma !!
J’espère que tout se passe bien pour vous deux !
De grosses pensées vers toi Coline 🙂
Profitez de la vie !
Bravo Coline et ton Loulou
Les souvenirs de l’été 2014 me remontent, quand Alice et Pylou nous partageais leur trip.
Je vous souhaite le meilleur sur votre route et j’espère partager prochainement le ressenti de M.Cécile.
On ne peut qu’être fière de nos enfants, quand ils vivent sur une telle dimension : Suivre le chemin de leurs envies…
Toutes mes félicitations et à vous lire.
Dany